La nouvelle directive NIS2 : quelles obligations pour les entreprises en matière de cybersécurité ?

La nouvelle directive NIS2 : quelles obligations pour les entreprises en matière de cybersécurité ?

Qu’est-ce que la directive NIS2 ?

Adoptée officiellement par le Parlement européen le 10 novembre 2022, la directive NIS2 (Network and Information Security 2) vient remplacer la directive NIS (directive (UE) 2016/1148), première législation européenne sur la cybersécurité mise en place en 2016. Face à l’évolution croissante des cybermenaces affectant aussi bien les infrastructures critiques que les entreprises privées, l’Union européenne a renforcé son arsenal réglementaire afin d’améliorer la cyberrésilience de ses États membres. La directive NIS2, publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 27 décembre 2022, doit être transposée dans le droit national des États membres d’ici au 17 octobre 2024.

Cette directive étend le périmètre d’application et renforce les obligations déjà établies par la précédente législation. Elle vise à harmoniser les cadres réglementaires entre États membres et à élever le niveau de sécurité des réseaux et des systèmes d’information des acteurs économiques et institutionnels majeurs.

Champ d’application élargi

La directive NIS2 impose désormais des obligations à un plus large éventail d’organisations. Elle distingue deux grandes catégories d’entités : les entités essentielles (« essential entities ») et les entités importantes (« important entities »).

  • Les entités essentielles : il s’agit des secteurs considérés comme critiques, comme l’énergie, les transports, les banques, la santé, l’eau potable et les infrastructures numériques. Ces entités sont soumises à un niveau de contrôle plus strict de la part des autorités nationales compétentes.
  • Les entités importantes : on y trouve, entre autres, les fournisseurs de services postaux, les fabricants d’équipements médicaux, les producteurs alimentaires ou encore les entreprises de services numériques non essentiels, telles que les plateformes de commerce en ligne.

En règle générale, la directive s’applique aux entreprises de taille moyenne ou grande (sauf exceptions pour certaines PME de secteurs critiques). Selon la définition de la Commission européenne, une entreprise moyenne emploie au moins 50 salariés ou dispose d’un chiffre d’affaires annuel supérieur à 10 millions d’euros.

Les principales obligations en matière de cybersécurité

La directive NIS2 introduit plusieurs obligations concrètes pour les entités concernées. Ces obligations couvrent tant les aspects organisationnels que techniques de la sécurité informatique :

  • Mise en œuvre de mesures techniques et organisationnelles : les entités doivent adopter une politique de gestion des risques pour sécuriser leurs systèmes d’information. Cela inclut la détection des incidents, la mise en place de politiques d’analyse des risques, ou encore la sécurité de la chaîne d’approvisionnement.
  • Notification des incidents de sécurité : les entités doivent notifier toute cyberattaque significative à l’Autorité nationale compétente dans un délai de 24 heures. Une notification complète doit être transmise sous 72 heures. Ce mécanisme vise à améliorer la réactivité et la coordination à l’échelle de l’UE.
  • Gouvernance et responsabilité : les dirigeants des entités sont désormais impliqués directement dans la gestion de la cybersécurité. La NIS2 introduit des obligations de formation pour les membres de la direction.
  • Évaluation régulière de la sécurité : les entreprises doivent réaliser des audits périodiques pour évaluer leur conformité et le niveau de maturité de leur cybersécurité.

En complément, les organisations concernées devront documenter leurs politiques de cybersécurité pour pouvoir les présenter lors de contrôles menés par l’autorité nationale, telle que l’ANSSI en France (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information).

Sanctions en cas de non-conformité

La directive NIS2 fixe un cadre de sanctions renforcé afin d’inciter les entreprises à se conformer strictement à leurs obligations. Les autorités nationales compétentes disposent désormais de pouvoirs accrus pour imposer des mesures correctrices ou prononcer des amendes.

  • Amendes administratives : les amendes peuvent s’élever jusqu’à 10 millions d’euros ou 2 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise, selon le montant le plus élevé.
  • Responsabilité des dirigeants : en cas de manquement grave, les autorités peuvent engager la responsabilité des membres de la direction, voire les suspendre temporairement de leurs fonctions.
  • Audits obligatoires : les entreprises peuvent être soumises à des audits internes et externes non programmés par les autorités compétentes.

Les spécificités en droit français

En France, la transposition de la directive NIS2 est en cours de préparation, sous l’égide de l’ANSSI. Elle entraînera des modifications dans le Code de la sécurité intérieure et d’autres textes législatifs applicables. Pour rappel, la France avait déjà intégré la première directive NIS via la loi n° 2018-133 du 26 février 2018.

Il est probable que le futur dispositif français introduise une procédure centralisée pour l’enregistrement des entités concernées, la désignation de responsables cybersécurité, ainsi que des guides sectoriels précis pour accompagner les organismes dans leur conformité.

En parallèle, le gouvernement français prévoit un appui renforcé aux PME, TPE et collectivités territoriales via le programme Cybermalveillance.gouv.fr et les Centres Régionaux de réponse aux incidents de sécurité (CSIRT).

Comment se préparer efficacement à la directive NIS2 ?

Pour être en conformité d’ici la date butoir d’octobre 2024, les entreprises doivent dès aujourd’hui engager une démarche proactive de mise en conformité. Voici quelques étapes fondamentales à suivre :

  • Identifier clairement votre classement : Déterminez si votre entreprise est considérée comme une entité essentielle ou importante selon les critères définis par la directive.
  • Mettre en place une gouvernance cybersécurité : Désignez un responsable cybersécurité et assurez la formation des dirigeants sur leurs responsabilités légales.
  • Cartographier les risques et les systèmes critiques : Réalisez une analyse de risques complète et identifiez les actifs numériques stratégiques.
  • Élaborer ou renforcer votre plan de réponse aux incidents : Définissez un processus clair pour le signalement des incidents, l’analyse des menaces et la coordination avec les autorités compétentes.
  • Se faire accompagner : N’hésitez pas à recourir à des prestataires spécialisés en cybersécurité (consultants, MSSP, éditeurs de solutions de détection et de protection) pour renforcer votre dispositif.

Ressources et textes officiels

Voici les textes et documents officiels relatifs à la directive NIS2 :

Vers une résilience numérique accrue

La directive NIS2 s’inscrit dans une volonté européenne forte de renforcer la résilience numérique face à des menaces de plus en plus fréquentes et sophistiquées. Les entreprises doivent s’engager sans tarder dans cette transition vers une cybersécurité plus robuste et mieux régulée. Le respect de cette nouvelle réglementation contribuera non seulement à éviter des sanctions, mais également à renforcer la confiance des clients, des partenaires et de l’ensemble de l’écosystème numérique.